⚠️ Avertissement : cet article aborde des sujets sensibles.
Si vous avez vécu des situations d’agression ou si certains contenus déclenchent des émotions fortes, sachez que vous n’êtes pas seul(e). N’hésitez pas à consulter un professionnel ou une ressource spécialisée.
Les stratégies mentionnées ici sont éducatives, mais ne garantissent pas une issue favorable dans toutes les situations. Elles visent à mieux comprendre certaines dynamiques et à offrir des pistes de réflexion et d’action.
Pourquoi parler d’agression par un agresseur connu ?
Contrairement à l’image véhiculée par les médias, la plupart des agressions ne sont pas commises par des inconnus surgissant dans une ruelle sombre. En effet, plus de 8 victimes d'agressions sexuelles sur 10 connaissent leur agresseur !
Les agressions ont alors lieu dans des contextes familiers, souvent banals, et sont perpétrées par des personnes connues de la victime : un collègue, un ami, un partenaire amoureux, un membre de la famille, un camarade de classe, un voisin, une connaissance.
Ces agressions s’inscrivent rarement dans une dynamique brutale et immédiate, comme pour les agressions perpétrées par un agresseur inconnu. Au contraire, elles se construisent généralement progressivement et insidieusement, à travers une série de comportements visant à tester, repousser, puis franchir les limites de la victime.
On peut identifier quatre grandes étapes dans la stratégie d’un agresseur connu :
- L'intrusion
- La désensibilisation
- L'isolation
- L'attaque
Dans cet article, nous allons détailler chaque étape et vous donner des stratégies pour vous aider à les reconnaître et à y répondre avec des outils concrets, tant sur le plan psychologique que physique.
Phase 1 – Intrusion
Les agresseurs connus tirent parti des relations qu'ils entretiennent avec des cibles potentielles et tentent dans un premier temps de paraître non menaçants. L'objectif de l'agresseur est alors de trouver des cibles dont il pense qu'elles seront plus sensibles à leur influence. Pour cela, il va commencer par tester les limites, souvent par des gestes ou des paroles présentés comme inoffensifs : une blague déplacée, un commentaire suggestif, un contact physique apparemment anodin.
Il s’agit rarement de maladresse. Ces comportements intrusifs servent à évaluer votre réaction. Parfois l'influence de la drogue ou de l'alcool contribue à la fois à l'audace de l'agresseur et à la volonté de la cible d'endurer la violence.
La phase 1 se termine lorsque l'agresseur croit que la cible accepte les comportements intrusifs initiaux.
Stratégies de défense – Phase 1 :
La stratégie de survie la plus importante de la phase 1 est d'établir des limites solides et sûres. Pour ce faire, vous devez d'abord connaître vos limites métaphoriques et physiques. Quel est le degré d'interaction qui vous intéresse avec cette personne ? Jusqu'à quel point le contact physique est-il acceptable ? Les réponses varieront probablement en fonction des circonstances sociales. Cependant, à tout moment, vous avez le droit de vous affirmer et d'exprimer votre désapprobation si l'autre personne dit ou fait quelque chose que vous jugez inapproprié.
La partie la plus difficile de la phase 1 consiste à déterminer si la personne en question constitue ou non une menace potentielle pour vous. Le moyen le plus simple de confirmer ses intentions consiste à évaluer sa réaction face à une limite établie. S'il refuse de reconnaître ou d'accepter la limite que vous souhaitez, cela indique clairement qu'il ne respecte pas votre confort et votre sécurité. Il cherchera alors à vous faire sentir coupable, mais restez sur vos positions, si le comportement de l'autre vous met mal à l'aise, c'est qu'il est inapproprié, et s'il est inapproprié, c'est qu'il doit cesser. En effet, une personne bien intentionnée n'insistera pas pour vous mettre mal à l'aise.
💡 À retenir en phase 1:
✅ Connaissez vos limites personnelles : vous avez le droit de dire non, sans vous justifier.
✅ Affirmez-vous verbalement : un simple "Je ne suis pas à l’aise avec ça." suffit.
✅ Observez la réaction : s’il insiste ou minimise, c’est un signal d’alarme.
✅ Fiez-vous à votre instinct : le malaise est une réponse légitime.
Phase 2 – Désensibilisation
Si l’intrusion n’est pas stoppée, l’agresseur peut chercher à vous habituer à ses comportements, à les normaliser et à affaiblir votre vigilance.
La phase 2 poursuit donc avec des intrusions verbales, physiques ou psychologiques répétées dans les limites personnelles dans les domaines où l'agresseur a trouvé des vulnérabilités exploitables.
Il peut multiplier les gestes de proximité, les commentaires « entre amis » ou tenter de créer une fausse complicité. Une fois que les comportements intrusifs initiaux sont devenus courant dans la relation, l'agresseur introduira progressivement de nouveaux comportements toujours plus intrusifs et des tactiques de contrôle pour désensibiliser davantage la cible. Ce processus peut durer une soirée ou plusieurs mois.
💡 Il est important de noter que l'utilisation des drogues et de l'alcool sont l'une des méthodes de désensibilisation les plus couramment utilisées.
La phase 2 s'achève lorsque l'agresseur estime que la cible est suffisamment désensibilisée pour passer à l'étape suivante dans un lieu isolé sans suspicion ni résistance.
Stratégies de défense – Phase 2 :
Lorsqu'une personne que vous connaissez commet ce type d'agression sexuelle, il est facile de pardonner les comportements intrusifs initiaux en supposant que la personne ne vous aurait pas fait de mal. La clé de la survie en phase 2 est de comprendre que, même si vous aviez d'abord ignoré ou même encouragé certains comportements de l'agresseur, vous n'avez aucune obligation de continuer à le faire!
Dès que vous vous sentez mal à l'aise ou que vous détectez de mauvaises intentions, vous êtes en droit d'exprimer vos préoccupations, de définir vos limites et de mettre fin à la situation. Pour la plupart des gens, le plus grand défi de cette phase consiste à exprimer ouvertement ses inquiétudes concernant des comportements précédemment tolérés. Cependant, lorsque votre sécurité et votre bien-être sont en jeu, vous ne pouvez pas vous permettre de vous préoccuper des sentiments ou de l'image publique de quelqu'un d'autre.
Toute personne qui vous respecte vraiment et mérite votre amour ou votre affection comprendra les limites que vous lui fixez. Vous n’avez aucune dette envers quiconque. Ce n’est pas parce que vous avez été gentille, polie ou amicale que vous êtes obligée d’accepter un comportement qui vous dérange.
💡À retenir en phase 2:
✅ Arrêtez la progression dès que vous ressentez un inconfort.
✅ Exprimez clairement vos limites, même si vous avez toléré certains gestes auparavant.
✅ Rappelez-vous : il n’est jamais trop tard pour dire non.
✅ Ne vous laissez pas piéger par la peur de "faire une scène". Protégez-vous d’abord.
Phase 3 – Isolement
En phase 3, l’agresseur cherche à vous éloigner des autres, physiquement ou émotionnellement afin de réduire la probabilité d'une intervention ou d'une interférence avec l'agression prévue.
L'agresseur n'aura généralement pas besoin de force physique pour cela, mais s'appuiera plutôt sur le faux sentiment de confiance qu'il a créé avec la cible. Cela peut passer par une invitation à se retrouver seul, ou par des tentatives de faire douter la victime de ses amis ou de son entourage.
La phase 3 se termine lorsque l'agresseur a isolé la cible.
Stratégies de défense – Phase 3 :
La clé de la survie en phase 3 est d'éviter de s'isoler avec toute personne que l'on soupçonne d'avoir des intentions malveillantes. Faites confiance à votre instinct ! Sachez que les agresseurs connus sont extrêmement manipulateurs et qu'ils diront ou feront n'importe quoi pour créer un faux sentiment de confiance.
Notez qu'un agresseur sexuel de l'entourage de la victime peut sauter les phases 1 et 2 s'il a la possibilité de l'isoler rapidement (lors d'une soirée avec de l'alcool ou des drogues par exemple).
Si vous êtes isolé avec une personne suspecte, retournez dans une zone peuplée le plus rapidement possible. Si l'agresseur tente de vous retenir, utilisez des techniques d'autodéfense comme celles vues dans le groupe Femmes en Confiance pour vous défendre et vous échapper.
💡À retenir en phase 3:
✅ Évitez de rester seule avec quelqu’un qui vous met mal à l’aise.
✅ Trouvez une excuse pour partir : vous n’avez pas besoin d’une raison "valable" pour quitter une situation inconfortable.
✅ Rapprochez-vous de personnes de confiance.
✅ Utilisez votre posture, votre voix et la gestion de la distance pour réaffirmer vos limites.
Phase 4 – Passage à l’acte
Une fois qu’il pense avoir franchi toutes les étapes, l’agresseur peut tenter de passer à l’acte, en s’appuyant sur la fausse intimité de la relation pour déguiser ses intentions et exécuter l'agression sexuelle prévue. Il est courant que, étant donné que la cible peut avoir toléré des commentaires ou des gestes inappropriés, l'agresseur insinue que les avances sexuelles proposées sont l'évolution naturelle de la relation.
Si la cible résiste, l'agresseur peut utiliser des stratégies verbales pour la contraindre à continuer, comme:
- "Tu m’as allumé."
- "Tu n’as jamais dit non avant."
- "Tu me dois bien ça."
- "T’as accepté de venir ici, tu savais à quoi t’attendre."
Le niveau de violence utilisé à ce stade pour exécuter l'agression sexuelle varie généralement et consiste souvent en une force physique juste suffisante pour décourager la résistance de la victime. À ce stade, l'agression ressemble à une agression par un inconnu, telle que décrite dans les phases 2, 3, 4 et 5.
Stratégies de défense – Phase 4 :
L'essentiel à comprendre est que, quel que soit le comportement toléré jusqu'à présent, il n'est jamais trop tard pour établir et faire respecter une limite ! Vous n'êtes jamais obligé de vous engager dans une activité sexuelle non consentante avec qui que ce soit, y compris les personnes que vous fréquentez occasionnellement, les petits amis et les maris.
Si l'agresseur vous maintient par la force, vous pouvez utiliser des techniques d'autodéfense pour neutraliser la menace et vous échapper. Lorsque vous décidez d'agir, faites-le avec confiance et conviction pour assurer votre sécurité.
💡À retenir en phase 4:
✅ Réaffirmez votre non, fermement : il n’est jamais trop tard pour poser une limite
✅ Utilisez votre voix, votre regard, votre posture pour vous faire entendre
✅ Si nécessaire, utilisez des techniques physiques d'autodéfense
✅ En dernier recours, vous pouvez utiliser la stratégie de la fausse reddition (voir le concept dans l'article sur les agressions par un inconnu).
Conclusion : Se protéger sans se culpabiliser
Les agressions commises par des personnes connues sont souvent insidieuses, progressives et profondément déroutantes. Elles exploitent la confiance, le doute et la peur de mal réagir ou de blesser les émotions de l'autre. C’est pour cela qu’il est essentiel de nommer ce type de dynamique, de l’expliquer, et d’y associer des stratégies de protection réalistes.
À chaque étape, vous avez des moyens d’agir :
- En reconnaissant les signaux d’intrusion et en posant vos limites.
- En refusant de normaliser un comportement inapproprié.
- En évitant l’isolement, ou en brisant le silence.
- Et si nécessaire, en utilisant des techniques physiques pour reprendre le contrôle.
Pour cela, le groupe de pratique Femmes en Confiance vous propose un cadre bienveillant et sécuritaire pour apprendre :
✔ À reconnaître les dynamiques de manipulation
✔ À fixer vos limites avec assurance
✔ À pratiquer des techniques concrètes d’autodéfense
✔ Et surtout, à retrouver votre pouvoir personnel
Se défendre face à un agresseur de notre entourage : 4 stratégies clés